Camille
(tiré « D’émotions fugaces en déceptions intenses »)

Tes yeux brillaient d’un feu magique :
De celui qui soutient les artistes…
Tu ne te croyais pas capable,
Tu voulais un maître honorable.
Ils ont daigné te rencontrer,
Monsieur Rodin et sa fatuité,
Ils ont tremblé devant les esquisses
D’un talent certain en ses prémices.

Amoureux fou de ton visage,
Envieux de tes fines mains,
Il a joué les grands sages,
T’amenant à n’être rien :
Amoureux fou de ton visage,
Envieux de tes fines mains,
Dominé par sa haine et sa rage,
Il t’a laissé chanter sans fin…

Ton petit frère aimait les livres,
Il composait de jolies phrases.
Avide d’écrire et d’en vivre,
Il se perdait dans ses extases.
Il craignait que tu ne réussisses,
Et qu’il ne reste embourbé,
Que le succès ne t’éblouisse,
Et qu’il ne soit qu’un raté.

Il n’a pas su te consoler.
Juste se placer auprès de votre mère
Et signer sur un papier
Afin que l’on mène en enfer ;
Juste se placer auprès de votre mère,
Le doute étouffé par une voix
Lui chantonnant que l’autre Claudel était fini…

Emprisonnée parmi les fous,
Tu as pleuré, tu as supplié ;
Tes lettres déplurent beaucoup,
Elles montraient trop l’intacte pensée !
Chacun chez soi, ils ont soupiré d’aise,
L’amant comme le frère ambitieux ;
Que tu ne crées, que tu te taises,
Le sacrait le meilleur de vous deux.

Ces hommes que tu aimais tant
Ont préféré te sacrifier,
Effrayés désespérément
Du feu qui te consumait ;
Ton art s’imposait, flamboyant,
Ils ont pressenti ta gloire,
La fin de leur avènement
Et t’ont enchaînée dans le noir.

- Isabelle Ménétrier -
( Jan/Fév 1998)

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